SESSION 2019 : EXPÉRIENCES IMPÉRIALES 1er/4 octobre - Bielle (Pyrénées-Atlantiques) |
Pour l’histoire des empires, la péninsule Ibérique et le Maghreb constituent des laboratoires exceptionnels. En effet, ces deux régions furent les pôles d’impulsion majeurs d’une succession de trajectoires impériales qui se sont déployées dans les directions les plus diverses : des califats et des sultanats d’Occident aux différentes revendications impériales de la royauté castillano-léonaise, en passant par les configurations variées de la Couronne d’Aragon. Les pionniers de cette histoire (Menéndez Pidal, Laroui) se sont longtemps focalisés sur l’ « idée impériale », dont ils soulignaient l’originalité, l’homogénéité et la continuité. Conçue comme un projet cohérent et unitaire, elle était envisagée comme l’émanation de la conscience que partageaient les peuples de former une unité « hispanique » ou « maghrébine ». Sans totalement disparaître, cette historiographie fut marginalisée par une autre, celle de la formation des Etats-nations, qui opposa les « réalités » de la construction des Etats territoriaux aux « mirages » impériaux. Aujourd’hui, l’histoire des empires opère un retour en force, fondé sur de nouvelles approches. Tout en menant un travail de déconstruction des grands récits impériaux, les chercheurs conçoivent désormais les empires comme des entités politiques instables, hybrides et éminemment pragmatiques. Ils les abordent comme des expériences politiques, en se focalisant sur ce qui « fait » empire et sur la mise en évidence de cultures impériales, à la fois diverses et connectées, irréductibles à un modèle unique.
C’est à l’exploration de ces expériences impériales, dans leurs dimensions textuelles et matérielles, que sont invités les participants de cette session 2019. La réflexion s’articulera autour de trois grands thèmes :
- Gouvernements impériaux
Dominant plusieurs entités politiques et des populations diverses, les empires se caractérisaient par une flexibilité, un pragmatisme et une adaptabilité, qui furent une des clés de leur longévité. Au delà du constat de la diversité des répertoires impériaux, on s’efforcera d’identifier des pratiques, des modes et des logiques de gouvernement qui relèveraient de fonctionnement impériaux.
- Imaginaires politiques
Ces formations impériales engendrèrent-elles une conscience politique commune ? L’analyse des mots, des gestes, des lieux et des objets permettra d’appréhender les éléments susceptibles de structurer un imaginaire impérial commun mais aussi de révéler des identités contradictoires, reflétant les tensions entre les groupes sociaux sur lesquels les empires s’appuyaient et avec lesquels ils devaient composer.
- Interactions impériales
Ces empires ne se sont pas construits de manière isolée. D’une part, les empires ont cherché à s’insérer dans les traditions impériales antérieures pour se légitimer. D’autre part, ils puisèrent des éléments dans d’autres modèles impériaux contemporains, par-delà les barrières religieuses et idéologiques. On s’intéressera aux processus de remploi, d’imitation et d’émulation, en étant attentif aux modalités d’appropriation, de recombinaison et au rôle des intermédiaires. Enfin, ces empires n’ont pas manqué de susciter, en réaction, des formes de contestation et de dissidence, qu’on analysera au miroir des modèles impériaux auxquels elles prétendaient s’opposer.
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Coordinateur scientifique : Yann DEJUGNAT (Université Bordeaux Montaigne)
Formateurs : Susana CALVO CAPILLA (Universidad Complutense de Madrid), Yann DEJUGNAT (Université Bordeaux Montaigne), Javier DOMINGO (Pontificia Università della Santa Croce, Rome), Tawfiq IBRAHIM (Chercheur indépendant), Marta LACOMBA (Université Bordeaux Montaigne), Flocel SABATÉ (Universitat de Lleida).
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