Vente des tonneaux. Bibliothèque d’Agen, Livre des statuts et des coutumes de la ville d’Agen, ms 0042, folio 87, XIIIe siècle. |
Les différentes règlementations portant sur la commercialisation des vins dans le duché d’Aquitaine différencient deux grands espaces viticoles : le Bas-Pays (« Bassa Patria ») et le Haut-Pays (« Alta Patria » ou « haut pais » en gascon). Fournissant la plus grande quantité de vin le Bas-Pays correspond au diocèse de Bordeaux alors que le Haut-Pays s’étend en amont de Saint-Macaire et de Castillon. Les rois-ducs favorisent par des privilèges le premier, alors que le second est plus ouvert à l’influence capétienne. Ainsi, l’interdiction faite aux vins du Haut-Pays de descendre à Bordeaux avant la Saint-Martin (11 novembre) donne l’avantage aux vins du Bas-Pays d’être vendus et exportés en priorité. Appliquée pour la première fois en 1241 puis entérinée par les rois-ducs successifs, cette coutume est renforcée par Édouard III le 15 mars 1373 : dorénavant, nul vin du Haut-Pays ne peut entrer dans Bordeaux avant la Noël (C61/86, 47, membrane 5, 40). Rédigé en pleine guerre de Cent Ans, ce texte démontre que le conflit franco-anglais se joue aussi sur le plan commercial. Une fois autorisés à pénétrer dans le Bas-Pays, les marchands de vin du Haut-Pays sont contraints de payer un droit d’entrée dans les villes pour chacun de leur tonneau, coutume appelée « issac » à Bordeaux. Un acte du 7 juin 1319 confirme que les bourgeois de Bordeaux en sont exemptés, même si le vin amené dans la cité provient d’un territoire extérieur à sa banlieue (C61/35, 17, membrane 3, 337). | |||
Dans le but d’éviter les fraudes, les règlements de la commercialisation locale sont criés publiquement et concernent essentiellement les vins étrangers, les mélanges de crus, les vins frelatés, la publicité mensongère, la vente illégale ou le respect des prix. Cette règlementation s’adresse surtout aux taverniers dont la fonction est étroitement contrôlée par les autorités. À Agen, un acte daté du 21 août 1320 rappelle que les taverniers souhaitant vendre du vin doivent jurer aux consuls de la cité (institution équivalente à celle des jurats) de payer une taxe de 5 sous par tonneau acheté (art. IV), sous peine de se voir retirer le privilège de la vente (C61/33, 14, membrane 6, 253). | ||||